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431. Mariage sans séparation
Posté par le 11/06/2007 à 08:22:51
Kvod Harav,
Ma question concerne la "Mé'hitsa" pour les tables dans les mariages.
Pour des raisons de Chalom avec la famille, la Halakha permet-elle de ne pas séparer les tables si:
-Les danses sont bien séparées (les hommes ne peuvent voir d'aucune manière les femmes danser).
-Un coin spécial pour les hommes celibataires, entouré d'une "Mé'hitsa" est aménagée.
-On précise aux invités qu'une tenue décente est exigée.
-On ne fait pas assoir dans la même table côte-à-côte les hommes et les femmes

Merci pour tout le travaille que vous faites, il nous est d'une grande utilité.
Kol touv

Réponse donnée par Rav le 26/06/2007 à 00:39:49
Il est rapporté dans la Guémara (1), à propos d’événement réunissant des hommes et des femmes, que Abayé avait l’habitude de dresser une séparation à l’aide de cruches en argile. Rabba, quant à lui s’appliquait à séparer les hommes des femmes par une haie constituée de roseaux.
Rachi sur place explique que cela se produisait entre autre à l’occasion de mariage.

Il apparaît par ailleurs (2) qu’il était d’usage de séparer les hommes des femmes à l’occasion d’une oraison funèbre.
Nos sages en déduisent qu’à plus forte raison on prendra soin d’établir une séparation quand on se réunit à l’occasion d’un évènement heureux.
A ce propos, Rachi explique que l’on devra être encore plus pointilleux dans les occasions ou l’on va être amené à se réjouir car cela risque de générer des « comportements légers » (Kaloute Roch).
Par ailleurs, cette situation de promiscuité crée un terrain favorable au Yétsèr Hara’ (on comprend aisément que des regards ou des discussions favorisent des pensées ou même des actes en contradiction avec sainteté requise chez un Ben Israël).

Nombreux sont donc les Décisionnaires (3), qui ont interdit de prononcer, lors du « Birkate Hamazone », la phrase rituelle : « Chéhassim’ha Bim’ono » (dont la résidence – de Hachèm- est remplie de joie), dans une telle situation (lorsque les hommes et les femmes peuvent se voir mutuellement).
En effet cette partie du rituel apparaîtrait comme un non sens, car il est évident que Hachèm ne se réjouit pas d’un tel état de fait comme nous le verrons plus en détail dans la suite de la réponse.

Il en résulte que si l’on fait fi des règles élémentaires de pudeur, on risque de transformer une occasion de se réjouir en prétexte à s’éloigner de la sainteté qu’exige de nous la Tora particulièrement en ce moment solennel qui marque les fondements de la vie d’un couple.

Par conséquent, dans tout repas organisé réunissant des hommes et des femmes, il convient d’être pointilleux en ce qui concerne la répartition des invités afin que les hommes et les femmes soient installés dans des pièces différentes ou dans une même pièce dotée d’une « Mé’hitsa » ( Séparation).
Tout au moins, il faudra prendre garde que les femmes et les hommes occupent deux parties distinctes de la salle et ne soient pas mélangés dans un même espace.
Et à fortiori, lorsque les femmes ne sont pas vêtues de façon convenable (4).

Il faut toutefois préciser que d’après le sens strict de la loi, la nécessité d’une séparation n’est absolue que lors d’un événement ouvert au public tel qu’une conférence par exemple.
Par contre lors d’une réunion privée, comme dans le cas d’un repas de mariage ou de « Chéva’ Bérakhote », il pourra être toléré une absence de « Mé’hitsa » séparant les femmes et les hommes, qui seraient néanmoins installés dans deux parties différentes de la salle.
Par contre, il semble plus difficile de permettre de les placer à une même table (5).

La solution que vous proposez, à savoir hommes et femmes assis dans un même espace, semble être la limite de ce que la Halakha pourrait tolérer dans une telle occasion, en cas de force majeur.
Sauvegarder le Chalom avec ses parents pourrait justifier une attitude moins rigoureuse à condition d’avoir auparavant, épuisé les voix de la négociation afin d’arriver à une solution pus proches des exigences de la Halakha. (6).

Ceci bien sur, à la condition que les femmes soient vêtues correctement.

Si en cas de force majeure, on a été contraint d’organiser la salle sans Mé’hitsa, il faudra au moins s’efforcer de placer une séparation entre les hommes des femmes au moment du Birkate Hamazone (actions de grâce qui suivent le repas).
En effet, comme nous l’avons déjà évoqué, le rituel du « Zimoune » (invitation à faire le Birkate Hamazone quand dix personnes au moins -dans notre cas- ont pris part au repas) nous impose de commencer par la phrase suivante : « Bénissons notre D’ dont la résidence est remplie de joie… ».
Ce qui signifie que la situation présente est une source de joie et de satisfaction pour Hachèm !
Or, il n’y a de véritable « Sim’ha » (joie) que celle qui est générée par l’accomplissement fidèle des Mitsvote, ainsi qu’il apparaît dans la Guémara (7).

Comment D. pourrait-il se satisfaire d’une situation qui, du fait de la proximité des hommes et femmes, va entraîner des regards (Issour Histakloute) et par conséquent des pensées déplacées qui nous éloignent de la sainteté même de l’événement ?

Par conséquent, nombreux sont les Décisionnaires (8), qui pensent que l’on ne pourra pas énoncer cette phrase qui est en contradiction avec la réalité. (9)

Il va sans dire qu’il est formellement interdit aux femmes de danser en présence des hommes.
On insistera d’autre part auprès des invitées pour qu’elles soient vêtues conformément aux règles de pudeur requises par la Halakha.

Kol Touv


1) Kidouchine 81a
2) Guémara Soukka 52a
3) Séfèr ‘Hassidim ; le Baïte ‘Hadach ; le Bèt Chémouèl ; Knéssèt Haguédola ; Béèr Hétèv ; Kitsour Choul’hane ‘Aroukh ; Pélé Yo’éts ; Ahavate ‘Héssèd et le ‘Hida
4) Sova’ Séma’hote tome 1 chap. 17 par. 11 ; Voir aussi le ‘Oz Véhadar Lévoucha page 489
5) Iguérote Moché Yoré Dé’a tome 4 chap. 24 par. 3 et Ora’h ‘Haïm tome 1 chap. 41, Ora’h ‘Haïm tome 5 chap. 11 et 12. Voir aussi le Iguérote Moché Ora’h ‘Haïm tome 1 chap. 44 duquel il ressort, en ce qui concerne la synagogue, que l’absence de séparation entre les hommes et les femmes qui forment malgré tout deux groupes séparés, bien qu’imposée par la Halakha, est moins grave que le fait d’être mélangés et assis cote à cote.

6) Voir le choute Iguérote Moché, Ora’h ‘Haïm tome 5 chap.11 alinéa 20, qui interdit de donner un cours de Tora à des hommes et des femmes sans séparation. Pourtant, il permettra malgré tout, dans le cas où cela serait impossible autrement, si le but est de ramener les participants à la Tora.
On pourra en déduire à plus forte raison, que dans notre cas où il s’agit de sauvegarder le Chalom avec ses parents, on pourra accepter l’absence de Mé’hitsa, d’autant plus que comme nous l’avons vu plus haut, il est possible d’être tolérant lors d’un repas à caractère privé ;Voir aussi le Séfèr Halikhote Bate Israël chap. 7 par. 16 qui témoigne avoir entendu du Rav Bèn Tsiyone Aba Chaoul qu’il serait possible de tolérer une telle situation si l’on ne craint pas que cela entraîne des femmes à danser à la vue de tous

7)Bérakhote 30b et Yoma 4b ; voir le commentaire des Talmidé Rabbénou Yona, à propos du verset de Téhillim 2,11« Guilou Bir’ada » (Réjouissez vous dans la crainte). On y explique que la véritable joie est celle qui est engendrée par le désir d’accomplir les Mitsvote dans la crainte et le respect de D

8) Séfèr ‘Hassidim chap. 393 ; Bèt Chémouèl Evèn Ha’ézèr chap. 62 alinéa 11 au nom du Ba’h même chapitre ; Chakh Yoré Dé’a chap. 391 alinéa 7.

9) Voir à ce propos le Séfèr Sova’ Séma’hote tome 1 chap. 17 par. 11, qui indique que s’il n’y a pas eu de séparation effective au moment du Birkate Hamazone, on pourra néanmoins à postériorité (Bédi’avad), dire le rituel habituel.