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324. Les droits financiers de la femme mariée ou en instance de divorce
Posté par le 27/12/2006 à 17:19:53
Bonjour harav Bieler

Vous ne me connaissez pas mais j'ai eu le plaisir de decouvrir les Institutions Na'halat shlomo lors du dernier gala
à paris. Je peux vous dire en toute sincerité et ce n'est pas seulement mon avis personnel, car des amis m'ont en parlé avant de vous decouvrir, vous avez là de merveilleuses institutions et je m'en suis rendu compte lors du Gala, vu l'importance que vous avez aux yeux des Rabanims Francais qui etaient presents et non des moindres.
Je sais que la soirée, et vous n'etes pas les seuls, n'a pas ete une grande réussite ( au niveau des dons), mais je peux vous affirmer que beaucoup de gens vous ont apprécié surtout pour ce que vous faites, en l'occurence votre merveilleux et unique beth oraa (personne et j'insiste personne ne possede un site en France comme celui ci avec autant de maitrise dans les reponses d'une qualité exceptionnelle et je parle ici du Rav kahn aussi).
Nous esperons etre là l'année prochaine si vous organiserez un nouveau gala avec une plus grande reussite beezrat hacheme. Nous aimerions vous aidez.
Je voudrais maintenant poser ma question au nom de ma kehilah et la je reste un peu discret pour ne pas donner de nom. Toutefois vous pourrez mettre la reponse sur le site si vous le desirez.
Il s'agit d'une femme en cours de divorce donc presque plus aucun lien avec son mari depuis 1 an environ en attente d'un divorce qu' elle attend comme le Machia'h ( son mari la bat). Elle veut donc faire une trouma dite "hagouna" en argent pour la communaué et le beth hamidrach (livre, chass et autres). Mais aussi des dons pour l'entretien d'un gmah. Je note ici que c'est de son argent gagné dans son job au cours de l'année d'attente.
Peut on accepté cet argent et si oui de quelle maniere.
Tiskou a mitvot et Béhatslaha
Hervé

Réponse donnée par Rav le 22/01/2007 à 22:44:56
En se mariant, un homme s’engage à un certain nombre d’obligations, destinées à pourvoir aux besoins de son épouse. Réciproquement, cette dernière aura à assumer des engagements vis-à-vis de son mari. Le détail de ces droits et devoirs, son discutés dans le Talmud, et compilés dans le Choul’hane ‘Aroukh, Evèn Ha’ézèr (1).

De tous les engagements du mari, le premier mentionné par le Choul’hane ‘Aroukh est celui des « Mézonote » (alimentation), soit pourvoir aux besoins alimentaires de sa femme (2). En contrepartie, le mari aura droit au « Ma’assé Yadaïm » (à l’œuvre des mains), c’est à dire à la rémunération de l’emploi de son épouse (3). Selon certains, le droit aux Ma’assé Yadaïm sera octroyé en contrepartie, non seulement des Mézonote (alimentation), mais également du « Késsoute » (l’habillement) (4). Le Késsoute ne se limite pas uniquement au vestimentaire et à ses accessoires, mais inclut également la fourniture du logement, son ameublement, les ustensiles de cuisine, la vaisselle, etc. (5).

Le droit du mari au « Ma’assé Yadaïm » (à l’œuvre des mains) de son épouse, est en fait l’une des «Takanate ‘Ha’hamim » (l’un des décrets d’ordre rabbinique), instaurées par nos Sages dans l’administration des droits financiers dans le couple, et dont l’objectif est la prévention de l’inimité, de l’hostilité. En effet, le mari qui a le devoir d’entretenir sa femme, et de subvenir à tous ses besoins – aux Mézonnote et au Késsoute notamment – aurait du mal à accepter de la voir gagner de l’argent et de se l’épargner, sans participer au financement de l’entretient du foyer, et surtout de sa propre subsistance (6).

Ce droit du mari au « Ma’assé Yadaïm » résulte donc de l’accomplissement de ses devoirs de « Mézonote » et de « Késsoute », et en est subordonné. Nos Sages ont voulu assurer la subsistance et l’entretient de la femme, et de ce fait, ont décrété que son droit aux « Mézonote » sera prioritaire ; le droit du mari au « Ma’assé Yadaïm » n’en sera que la contrepartie. De ce fait, la prérogative sera laissée à la femme, et elle pourra faire valoir sa préférence : voudra-t- elle être nourrie et entretenue par son mari - et donc renoncer au droit à son « Ma’assé Yadaïm », ou bien préfèrera-t-elle renoncer à ses « Mézonote », pour conserver son « Ma’assé Yadaïm ». C’est la raison pour laquelle, si elle venait à déclarer « Enéni Nizonète Véénéni ‘Ossa » (je ne serait pas nourrie, et je ne ferait pas – de « Ma’assé Yadaïm »), en l’occurrence, je renonce à mes droits aux « Mézonote » et au « Késsoute », afin de maintenir mon droit sûr la rémunération de mon travail, « elle sera entendue » (7).

Parallèlement, le mari qui, pour quelque raison que ce fût, n’assume pas ses responsabilités et ne fournit pas à sa femme les « Mézonote » et le « Késsoute » auxquels elle a droit, se trouvera déni de tout droit sûr le « Ma’assé Yadaïm ». Ceci est valable même lorsque cette dernière n’a fait aucune déclaration de « Enéni Nizonète Véénéni ‘Ossa » (je ne serait pas nourrie, et je ne ferait pas – de « Ma’assé Yadaïm ») (8).

Il ressort de ce qui a été énoncé, que lorsque le mari n’a pas de droits sûr l’argent gagnée par sa femme, cette dernière sera entièrement libre d’en disposer à sa guise. Et donc de décider d’en faire un don pour la propagation de la Tora ou le soutient de son étude.

Par contre, la femme mariée dont le « Ma’assé Yadaïm » revient au mari ne pourra pas disposer de cet argent, ou d’une partie de cet argent, sans le consentement de celui-ci. Il en ira de même pour faire un don. Cependant, l’importance de ce don aura une incidence sûr cette Halakha. S’il s’agit d’une somme modique – relativement à l’avoir et aux revenus du mari – la femme pourra en faire don. Mais si le mari s’y oppose, elle ne pourra pas le faire, et même pour une somme infime. Dans ces cas, les représentants de la Tsédaka auront également à refuser ce don (9).

Nous ne manquerons pas de signaler, que les affaires financières du couple en instance de divorce – au même titre que tout litige, quelle qu’en soit la nature - ne seront en aucun cas présentées devant un tribunal laïque (10). Ces affaires devront êtres présentées devant un Bèt Dine, spécialisé en la matière, qui les traitera, et arbitrera dans tous les points de désaccord, selon la Halakha. De plus, il saura guider les membres du couple avec sensibilité, et les aidera à franchir ce cap difficile de leur vie.

Notons enfin, qu’au cours des audiences au Bèt Dine, ce dernier analysera les facteurs de l’échec de ce mariage. Leur nature et leurs conséquences auront une incidence – entres autres – sûr les droits réciproques éventuels des membres du couple, au niveau des Mézonote et du Késsoute, ainsi que du Ma’assé Yadaïm (11).


Kol Touv, et Béssourote Tovote.


(1) Hilkhote Kétoubote, à partir du chapitre 69.
(2) Ad. loc. par. 1, ainsi que chap. 70.
(3) Ad. loc. chap. 69 par. 4, ainsi que chap. 80.
(4) Voir le Bèt Chémouel, ad. loc. chap. 69 alinéa 1.
(5) Evèn Ha’ézèr, chap. 73
(6) Guémara Kétoubote, 58b ; voir également 81b et Tossafote, fin du morceau intitulé Éla, Baba Métsia, 12b, Yébamote, 90b, Baba Kama 102b, ainsi que Kidouchine 63a.
(7) Guémara Kétoubote, 58b, Choul’hane ‘Aroukh Evèn Ha’ézèr, chap. 69 par. 4. Voir encore le Bahèr Hétèv, ad. loc. alinéa 2, ainsi que le Pit’hé Téchouva, ad. loc. alinéa 1 ; voir aussi le Rama, ad. loc. chap. 80 par. 15.
(8) Voir le Maguid Michné, Hilkhote Ichoute Pérèk12 Halakha 22, au nom du Rambane et du Rachba, le Rane, fin du Pérèk « Af ‘Al Pi », morceau intitulé Vé-im Éno Notèn, le Rama, Evèn Ha’ézèr, chap. 70 par. 12, ainsi que chap. 80 par. 18, le ‘Hélkate Mé’Hokèk, chap. 80 alinéa 31, ainsi que chap. 70 alinéa 41, le Bahèr Hétèv, ad. loc. chap. 80 alinéa 1. Voir encore le Michné Lemélèkh, Hilkhote Ichoute Pérèk 28 Halakha 1, le Choute Rav Pé’alim, tome 2 Evèn Ha’ézèr chap. 15, et le ‘Hazone Ich, Evèn Ha’ézèr, chap. 70 par. 6.
(9) Choul’hane ‘Aroukh, Yoré Dé’a chap. 248 par. 4 ; voir aussi le Pit’hé Téchouva, ad. loc. alinéa 3. Voir encore le Bèt Chémouèl, Evèn Ha’ézèr chap. 91 alinéa 13, le Pit’hé Téchouva, ad. loc. alinéa 1, le Choute Mahari Assad tome 3 chap. 43, le Choute Maharcham tome 1 chap. 32 et 45, et le Choute Choèl Ouméchiv, première édition tome 3 Chap. 195 et 196. Il semblerait qu’une femme qui est « Nossèt Vénoténèt Bétokh Habaït » (qui gère les affaires du foyer), puisse faire des dons mêmes importants, voir le Chakh, ‘Hochène Michpat chap. 96 alinéa 9, le Choute Noda’ Bihouda, kama, Yoré Dé’a chap. 72. Voir encore le Choute lévouché Mordékhaï chap. 172.
(10) Voir le Choul’hane ‘Aroukh, ‘Hochèn Michpate chap. 26 par. 1.
(11) Le statut du Morèd (le mari rebelle) ou de la Morédèt (la femme rebelle), qui ont refusés l’accomplissement de leurs devoirs conjugaux, est lié aux droits aux Mézonotes et au Ma’assé Yadaïm. Le développement de cette question, ou même la mention de ses références, dépasse le cadre de ce responsa. Signalons seulement, le Choul’hane ‘Aroukh, Evèn Ha’ézèr chap. 70 par. 12, chap. 77 par. 1, 2 et 3, ainsi que le Bèt Ya’acov, ad. loc. chap. 2, et le Bèt Chémouèl, ad. loc. Dine Morèd Oumorédèt Biktsara, fin de l’alinéa 1 ; le Choute Iguérote Moché, Evèn Ha’ézèr tome 1 chap. 137, morceau intitulé Aval Bé’ouvda ; le Choul’hane ‘Aroukh, ad. loc. chap. 90 par. 5, ainsi que le Bèt Ya’acov, ad. loc. ; le ‘Hazone Ich, Hilkhote Kétoubote chap. 69 par. 15.