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    Jeudi 18 Avril 2024, Yom 'Hamichi

709. Bénédiction sur un aliment interdit
Posté par nico le 11/05/2008 à 22:04:36
Chalom Rav,
Peut-on réciter une bénédiction sur un aliment "Tarèf" (interdit à la consommation) ?
La question peut surprendre.

Pourtant son utilité existe dans au moins deux cas:
-Je me retrouve sur une île déserte, je meurs de faim, et le seul aliment que je trouve n'est pas Kachèr (comme des crustacés par exemple). Dois-je malgré tout faire la Bérakha (bénédiction) sur cette nourriture Tarèf ?

-Une personne en voie de Téchouva a déjà pris sur elle de faire les bénédictions, pourtant elle ne mange pas que des aliments Kachèr. Cette personne fera-t-elle la Bérakha ? C'est ce dernier cas qui m'intéresse, car un ami m'a posé la question.

J'ai bien entendu essayé de lui expliquer l'importance de la Kacheroute. Je précise que la personne en question ne mange pas de viande Tarèf, mais ne fait pas attention aux interdits de "Bichoul Goy", ne regarde pas si le produit est certifié par une "Hachga'ha" (surveillance rabbinique)...
Merci pour votre aide, et pour vos réponses si riche en références, c'est un vrai régal!

Réponse donnée par Rav Aharon Bieler le 05/12/2020 à 20:29:25
Avant d'aborder le sujet que vous soulevez, permettez-moi une petite introduction concernant le fait que cette question peut sembler surprenante.
Sachez que cette question a été abordée par nos Sages dans la Guémara (1), débattue par les Décisionnaires aux cours des générations, traitée de façon explicite à deux endroits du Choul'hane 'Aroukh et commentée par les A'haronim (Décisionnaires postérieurs aux Choul'hane 'Aroukh).

Il arrive souvent d'imaginer que l'on soulève des situations qui apparaissent comme saugrenues ou totalement improbables et qui par conséquent n'ont jamais été examinées ni par les Décisionnaires ni par les commentateurs. C'est faire fi de l'immense sagesse et de la grande perspicacité de nos Sages qui se sont ingéniés à sonder le plus profond de la psychologie humaine, et à envisager et a disséquer toutes les éventualités qui peuvent se présenter dans la vie d'un homme.

Pour en venir à votre problème je vous citerai le Choul'hane 'Aroukh (2) qui s'exprime en ces termes: "Celui qui a mangé un aliment interdit (3), même si l'interdit n'est que d'ordre rabbinique, ne fera sur cet aliment aucune bénédiction, ni avant ni après sa consommation".
En effet, le fait de manger un tel aliment est une transgression de la volonté de D. Faire une bénédiction sur cet aliment interdit sera alors considéré non pas comme une louange mais une offense et un outrage à D. (4).

Dans le cas où cet aliment aurait été consommé "Béchoguég" (par erreur sans connaissance de l'interdit), on pourra faire la bénédiction finale, car il n'y avait aucune intention à priori d'offenser Hakadoch Baroukh Hou (5).

Par contre, quelqu'un qui se trouverait dans l'obligation de consommer un tel aliment, du fait qu'il se trouve en situation de danger (maladie, famine…), aurait l'obligation de faire les bénédictions qui s'imposent. En effet, dans un tel cas, manger un aliment « Tarèf » n'est plus une interdiction mais devient une Mitsva afin de pouvoir "vivre".
Nos Sages apprennent ce concept du verset "Va'haï Bahèm" ce qui signifie "et tu vivras par elles" (les Mitsvote). Ils le commentent ainsi : "les Mitsvote doivent être la source de ta vie et non pas la cause de ta mort".

Notons toutefois l'avis du Rambam (6) que même dans ce cas si la personne est dégoûtée par l'ingestion de cet aliment, elle n'aura pas d'obligation de faire de bénédiction.

Rapportons enfin l'avis du Rama (7) selon lequel si on a été forcé par un ennemi (comme c'est malheureusement arrivé si souvent au cours de l'histoire juive) à consommer un aliment interdit, on ne fera pas de bénédiction sur celui-ci (8).

Il faudra donc expliquer à votre ami que bénir Hachèm pour un aliment qu'il a lui-même interdit est une contradiction flagrante et qu'il est préférable pour lui de s'en abstenir tant qu'il ne se sera pas renforcé dans son judaïsme (du moins au niveau de la Kacheroute).

Kol Touv


1) Bérakhote 48
2) Ora'h 'Haïm chap. 196 par. 1
3) Voir Michna Béroura chap. 196 alinéa 1 qui précise que la loi sera la même si l'aliment est Kachèr mais que la personne en question s'est interdit sa consommation à la suite d'un Nédèr (vœu).
4) Michna Béroura chap. 196 alinéa 3 au nom de Rachi dans la Guémara Bérakhote 47, début de citation "Hamat'hil"
5) Michna Béroura chap. 196 alinéa 4, voir également dans cet alinéa le cas d'un aliment qui serait le produit d'un vol
6) Cité par le Cha'aré Téchouva chap. 196 alinéa 2
7) Ora'h 'Haïm chap. 204 par. 8
8) Voir la raison dans Michna Béroura chap. 204 alinéa 45
 

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