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    Vendredi 29 Mars 2024, Yom Chichi

312. Couscous ou casse tête ?
Posté par moché le 14/11/2006 à 09:39:21
Chalom

Peut-on verser pendant Chabbate de l'eau chaude sur de la semoule pour faire du couscous ?
Merci

Réponse donnée par Rav Aharon Bieler le 25/12/2006 à 22:59:37
Il est énoncé dans la Michna (1) : « Tout élément ayant été cuit avant le Chabbate, pourra être placé sur un feu le Chabbate. Et tout élément n’ayant pas été cuit avant le Chabbate, pourra [tout de même] être rincé [à l’eau chaude] pendant le Chabbate, hormis le « Mélia’h Hayachane » et le « Kouliass Haïsspanine » [différentes sortes de poissons], pour qui le rinçage constitue la fin de leur préparation ».

En d’autres termes, un aliment ayant été complètement cuit avant le Chabbate (Mévouchal Kol Tsorko), pourra être réchauffé pendant le Chabbate. Ce ne sera pas considéré comme une « cuisson » par la Halakha. C’est-à-dire que l’on appliquera le principe selon lequel, il n’y a pas de cuisson, à la suite d’une première cuisson (Ceci ne s’applique que pour les aliments secs, sans sauce).
Si en revanche, aucune cuisson n’a été faite auparavant, mettre ce plat sur un feu, reviendrait à transgresser l’interdit Toranique de « Mévachèl » (cuire).

Toutefois, il est permis de le passer sous de l’eau chaude pendant le Chabbate (le « rinçage » de la Michna), à partir d’un «Kéli Chéni » (second récipient), c’est-à-dire un récipient qui reçoit l’eau qui a cuit dans un « Keli Richone » (premier récipient) qui était placé directement sur le feu (2).

Ces règles ne s’appliquent toutefois qu’à des aliments dont la cuisson est lente. Par contre, tout aliment dont la cuisson est obtenue en un laps de temps relativement court, à l’image du « Mélia’h Hayachane » et du « Kouliass Haïsspanine », ne pourra être passé sous l’eau chaude, pas même à partir d’un « second récipient ».
La Guémara explique qu’étant donné que leur cuisson est obtenue facilement, le fait de verser de l’eau chaude sur eux constitue leur cuisson propre. Ce procédé relève donc d’une transgression capitale, ces denrées étant désignées dans la Halakha du nom de « Kalé Habichoul », les aliments dont « la cuisson est facile ». (3).

Par ailleurs, le Choul’hane ‘Aroukh (4) mentionne que d’après certains avis, il est interdit de faire cuire (par un mode de cuisson à l’eau), pendant Chabbate, un aliment qui aurait été préalablement cuit à sec, comme la cuisson du pain dans un four (Afiya), ou qui aurait été grillé.

Par conséquent, d’après cet avis, il serait interdit d’introduire du pain dans une casserole d’eau chaude, fusse-t-elle un « second récipient », tant que la température de l’eau est au degré de « Yad Solédèt Bo », c’est-à-dire la température à partir de laquelle un aliment peut cuire (autour de 45 degrés) (5).
Le Choul'hane 'Aroukh ajoute que certains permettent une cuisson à la suite d’un grillage. Le Rama précise cependant que cette permission n’est valable que dans un « second récipient », mais il ajoute que d’autres décisionnaires permettaient la chose même dans un « premier récipient ». En conclusion, le Rama écrit : « Il me semble qu’il faut se montrer rigoureux a priori de ne pas introduire de pain, pas même dans un « second récipient », tant que la température de l’eau est au niveau de « Yad Solédèt Bo » », suivant la première opinion citée dans le Choul'hane 'Aroukh.

Le Choul'hane 'Aroukh retint quant à lui la seconde opinion, et permet donc de cuire dans de l’eau chaude d’un « second récipient » un morceau de pain (6), tandis que le Rama l’interdit dans la mesure où le pain pourrait être considéré comme un « Kalé Habichoul » (aliment à la cuisson facile) (7).

Nous en arrivons à présent au problème du couscous.
Il existe en réalité trois cas de figure distincts :

A. Le couscous cuit à l’eau.
B. Le couscous cuit partiellement à l’eau, et dont la cuisson s’achève lorsqu’il est introduit dans un liquide bouillant, à l’image d’une soupe.
C. Le couscous cuit au four, très courant de nos jours dans les couscous produits dans des usines, dans lesquelles le grain est grillé à une température d’assèchement.

Il nous faut déterminer pour ces trois différentes catégories le statut d’une cuisson dans un « premier récipient », un « second récipient » et un « troisième récipient » (récipient dans lequel à été transvasé le contenu du second récipient et qui a donc perdu, d’après la majorité des avis, tout pouvoir de cuisson, même par rapport aux « Kalé Habichoul »).

Pour la première catégorie de couscous, déjà entièrement cuit à l’eau ou à la vapeur avant le moment de la consommation, il est même permis de l’introduire dans un « premier récipient » (après qu’il ait été retiré du feu), étant donné qu’il n’y a pas de « cuisson à la suite d’une première cuisson » (8).

En revanche, le couscous dont la cuisson se poursuit et s’achève grâce à l’effet de la soupe à laquelle il est mélangé, il est interdit de l’introduire même dans un « second récipient » à une température de « Yad Solédèt Bo », ou encore de verser de l’eau chaude à partir d’un « second récipient » (9). Dans un « troisième récipient » en revanche, il serait permis d’y introduire cette catégorie de couscous (10).

Concernant le couscous précuit au four, tous les avis s’accordent à penser que son introduction dans un « premier récipient » relève d’une cuisson, étant donné qu’il existe encore un stade de cuisson consécutivement à celui opéré par un four. Dans un « second récipient », le Bèt Yossèf le permet (11), tandis que le Rama l’interdit (12), comme nous l’avons vu plus haut. Quant à un « troisième récipient », aucun problème ne subsiste selon toutes les opinions mentionnées. (13).

Précisons toutefois que ceci n’est vrai que pour un couscous assurément « cuit » ; en ce qui concerne le couscous vendu couramment de nos jours, il est quasiment impossible d’établir qu’il soit cuit dans le sens halakhique du terme dans les fabriques de production ; en effet, nombre d’entre elles utilisent des systèmes de cuisson qui consistent à sécher la farine à l’aide de soufflerie ou autre, dont la température ne s’élève pas au delà du degré de « Yad Solédèt Bo ». Le couscous ne peut par conséquent être considéré comme cuit, et le fait d’y verser de l’eau bouillante relève d’une première cuisson, comme dans la première catégorie mentionnée plus haut.

Il nous faut en outre prendre en considération le principe de « Davar Gouch » (aliment solide et compact), qui inclut tous les aliments dans lesquelles la chaleur se conserve à plus long terme.
En effet, si la soupe versée sur le couscous contient des pommes de terre par exemple, le Michna Beroura par. 65 rapporte au nom du Maguèn Avraham que la cuisson se poursuit même dans un second ou troisième récipient. Ainsi, bien que généralement, un « second récipient » ne cuit pas du fait que ses parois refroidissent l’aliment, néanmoins, la présence d’un « Davar Gouch » relève tout de même d’une cuisson dans la mesure où ces aliments recèlent une chaleur indépendante qui subsiste longtemps après leur retrait de la source du feu (14).
Toutefois, nombre de décisionnaires (15) estiment que cette notion n’est valable que concernant l’absorption des aliments interdits, comme par exemple pour les problèmes des mélanges de lait et de viande.

Il faut donc s’appliquer à ne pas verser de soupe contenant des aliments définis comme étant « Davar Gouch » sur du couscous dont la cuisson n’est pas entièrement achevée, pas même dans un « troisième récipient ».
Dans le cas où le couscous est déjà cuit auparavant dans un four, il n’est pas non plus évident d’autoriser la chose en présence de tels aliments.


Un dernier problème est enfin à prendre en considération : le travail de « Licha », c’est à dire l’interdit de pétrir une pâte pendant Chabbate. En effet, dans la mesure où ce travail consiste à assembler divers éléments en un seul bloc (16), si les grains de couscous se collent les uns aux autres lorsqu’ils trempent dans l’eau, ceci relève d’un interdit évident.


A. Du grain de couscous parfaitement cuit peut être introduit même dans un « premier récipient », lorsque celui-ci est retiré du feu, à la condition que le problème de pétrir ne se pose pas, c'est-à-dire que les grains de couscous ne se lient pas pour former une pâte.

B. Du grain de couscous qui n’est pas parfaitement cuit, et à plus forte raison qui n’est pas du tout cuit, ne pourra pas même être introduit dans un « second récipient », ni non plus être déposé dans une assiette sur laquelle on verserait de l’eau chaude à partir d’un « second récipient » (Irouï Kéli Chéni).
Concernant un « troisième récipient » qui contiendrait de l’eau chaude, le Michna Béroura permet de l’y introduire, à condition qu’il n’y ait pas une présence d’aliment défini comme étant « Davar Gouch »,tandis que le 'Hazone Ich l’interdit dans tous les cas.

C. Un couscous ayant été cuit auparavant au four, ne pourra être introduit dans un « premier récipient ».
Dans un « second récipient », ce sera permis pour les Séfaradim , suivant l’avis du Bèt Yossèf, tandis pour que les Achkénazim ce sera interdit, conformément à l’opinion du Rama.
Dans un « troisième récipient », tous les avis le permettent à la condition qu’aucun des aliments présents dans l’assiette n’entre dans le cadre des « Davar Gouch ».

D. Concernant le couscous manufacturé et particulièrement courant de nos jours, il y lieu de le considérer comme étant « non cuit », étant donné que la température de cuisson pratiquée dans les usines n’est pas déterminée.


1) Chabbate 145b
2) Verser de l’eau à partir d’un « premier récipient », dans lequel l’eau a chauffé directement sur le feu, reste cependant interdit, étant donné que de la sorte, une cuisson se produit « sur la surface d’une pellicule » (Kédé Klipa) Choul'hane 'Aroukh Ora'h 'Haïm chap. 318, 10
3) Concernant la définition de ces aliments, le Biour Halakha chap. 318, 3, rapporte au nom du Rambam chap. 9, 2 que tout aliment similaire, composé de particules très fines et à la constitution tendre, entre dans le cadre des « Kalé Habichoul ». Il ajoute en outre dans le paragraphe 42 que c’est la raison pour laquelle il faut s’appliquer à ne pas tremper de pain et tout autres sortes d’aliments dans un « second récipient » empli d’eau, étant donné que la définition précise de cette qualité d’aliments ne nous est pas connue. Le ‘Hazone Ich (chap. 52, 19) ajoute par ailleurs que seuls les aliments mentionnés explicitement dans la Guémara possèdent le statut de « Kalé Habichoul » ; en revanche, ce qui ne paraît pas dans cette liste conserve un statut incertain, et ne peut être décrété avec certitude comme faisant partie de cette catégorie. En vertu de cette explication, le ‘Hazone Ich précise qu’en dépit du fait que ces aliments à la cuisson aisée ne peuvent être introduits dans un « troisième récipient » empli d’eau chaude, il est toutefois permis de faire tremper ces nourritures au statut douteux, étant donné qu’il ne s’agit que d’un simple doute. Le Michna Béroura (par. 47) rapporte en revanche, au nom du Péri Mégadim (Echèl Avraham 35) que dans un « troisième récipient », tout aliment quel qu’il soit peut être réchauffé
4) ibid. par. 5
5) Concernant le degré précis de température de « Yad Solédèt Bo », plusieurs avis furent émis par les décisionnaires contemporains. Certains rapportent au nom du ‘Hazone Ich et du Kéhilote Ya’acov que dès 40°C, il y a lieu de considérer cette eau comme susceptible d’occasionner une brûlure. Rav Chlomo Zalman Auerbach (Min’hate Chlomo chap. 91, 8) affirme quant à lui que jusqu’à une température de 45°C, il n’y a pas lieu de craindre à une cuisson. Précisons au passage que ces mesures ne sont valables que pour l’aspect strict de la Halakha ; si en revanche, le fait qu’un liquide ait atteint le niveau de « Yad Solédèt Bo » constitue un aspect dérogatoire, comme par exemple dans le cas où de ce fait, on veuille permettre de laisser sur le feu un tel liquide, le Iguerote Moché (tome IV, 74) précise que cet aspect permissif ne peut s’appliquer qu’à partir d’une température de 71°C (par ailleurs, dans le tome II, chap. 52, il écrit que le niveau de « Yad Solédèt Bo » n’est atteint qu’à partir de 79,4°C) ; ces différents avis sont rapportés dans le Or’hote Chabbate chap. 1, note 29
6) Selon le Béèr Hagola note 20, qui indique la référence de cette décision dans les paroles du Mordékhi, il apparaît que le Choul'hane 'Aroukh considère qu’il n’y a pas non plus de telle cuisson pas même dans un « premier récipient » ; le Rama et le Michna Béroura s’oppose toutefois de toute évidence à cette conception
7) Comme vu plus haut dans la note 3
8) Choul'hane 'Aroukh par. 4
9) Choul'hane 'Aroukh 318 par. 4, Michna Béroura alinéa 35-36 au nom du Tosséfèt Chabbate, dans la mesure où le versement à partir d’un « premier récipient » réalise une cuisson au même titre que si l’aliment avait été introduit dans le récipient proprement dit, il en va de même pour le versement à partir d’un « second récipient »
10) Michna Béroura 47 ; A noter toutefois que le 'Hazon Ich chap. 52/ 19 l’interdit.
11) et selon le Béèr Hagola, cette cuisson est autorisée même dans un « premier récipient », comme mentionné plus haut dans la note 6
12) Précisons en outre qu’un second aspect dérogatoire peut s’additionner même selon l’avis du Rama qui proscrit la cuisson d’un couscous précuit dans un four, dans la mesure où il y aurait lieu de considérer la louche avec laquelle la soupe est versée comme étant un « second récipient », transformant de la sorte l’assiette en un « troisième récipient ». En effet, le Michna Béroura écrit d’une part que dans l’alinéa 87 que la louche ne peut être considérée comme un récipient intermédiaire, mais par ailleurs, dans l’alinéa 45, il rapporte comme une évidence qu’une louche possède le statut de récipient tiers ; afin de résoudre cette contradiction apparente, il nous faut admettre qu’il est question dans ces différents passages de deux cas de figure distincts : dans l’alinéa 45, il est en effet question d’un aliment déjà cuit au four, de telle manière que l’on peut se montrer plus permissif en considérant une louche comme un récipient intermédiaire, alors que dans l’alinéa 87, où il traite de la première cuisson d’un aliment, il nous faut nous montrer plus strict Or’hot Chabbate chap. 1, 42, note 106 et 163
13) Michna Béroura 47, et même selon le 'Hazon Ich cité dans la note 3, qui interdit les cuissons d’aliments qualifiés de « Kalé Habichoul » même dans un troisième récipient, ceci n’est valable que pour les aliments mentionnés explicitement dans la Guémara, qui sont indubitablement considérés comme tels, ou pour les aliments n’ayant pas été précuits ; pour le couscous en revanche, il est possible d’associer deux raisonnements tendant à permettre : en premier lieu, il ne possède que le titre de « Kalé Habichoul » incertain, c'est-à-dire que nous ne possédons aucune certitude quant à son statut d’aliment à la cuisson aisée. De plus, étant donné que les grains de couscous étaient déjà précuits au four auparavant, il est également possible d’associer dans ce cas précis l’avis du Bèt Yossèf, qui autorise la cuisson dans un tel cas
14) Maharchal chap. 7 de ‘Houline, 44 rapporté par le Chakh Yoré Dé’a chap. 105, alinéa 8
15) Min’hate Its’hak chap. 61, 55, Péri Mégadim Yoré Dé’a chap. 94, 14, ‘Havote Da’ate 105, 16 et Bèt Méïr Ora’h ‘Haïm 318
16) Iglé Tal Lach par. 1
 
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